A un mois de la votation populaire, le leader des référendaires et le président de l'association en faveur du projet exposent leurs arguments.
Laurent Dorand, du parti des Gens de Gland (GDG), est farouchement opposé à la piscine de Montoly. Epaulé par deux membres de son parti et deux citoyens de la commune, il lançait fin octobre un référendum pour contrer la décision du Conseil communal de valider le projet. Un processus qui a abouti à la votation populaire qui se tiendra le 8 mars prochain.
Laurent Dorand, vous voterez "non" à la piscine. Avec quels arguments?
Le coût, tout d'abord. Initialement, en 2010, le projet était évalué à 11 millions de francs. Aujourd'hui, il se chiffre à 19,8 millions, frais d'étude compris! Cela représente donc une augmentation de 80% du montant pour une infrastructure quasi similaire à celle proposée au départ. Soit six lignes de nage, sans plongeoirs. Seule nouveauté: la pataugeoire, prévue dans le projet de base, est devenue un bassin d'apprentissage.
Pour vous, cette hausse du coût de l'ouvrage est donc injustifiable?
En tous cas, je ne me l'explique pas. A titre de comparaison, Coppet est parvenu à valider un projet de piscine pour le même prix qu'à Gland mais avec, en plus, une patinoire et un bassin d'apprentissage avec fond mobile (ndlr: le bassin a été mis à l'enquête au mois de novembre) . Quant à la piscine de Chéserex, certes un peu plus petite que celle projetée à Montoly, elle a coûté au final 13 millions de francs, frais d'étude compris.
Votre second argument touche à la hausse d'impôts associée à l'infrastructure.
A la base, la Municipalité avait présenté la piscine aux conseillers communaux comme quelque chose qu'elle pouvait financer elle-même. Mais, dans son projet final, elle finit par annoncer qu'elle entraînera une hausse d'impôts. Cette hausse représentera 750 000 francs de recettes fiscales supplémentaires par année. Une somme qui ne pourra même pas couvrir le déficit de l'installation prévu par la Municipalité. Elle l'estime à 850 000 francs par an. Ce qui, selon moi, est encore sous-évalué, d'ailleurs.
Une piscine à Gland, ce serait donc un luxe?
Absolument! J'ai fait une petite étude. La ville de Lausanne dispose de trois piscines couvertes pour 140 000 habitants. Genève, idem, mais pour 200 000 habitants. Dans le district de Nyon, en prenant en compte l'infrastructure de Coppet, il y a six piscines couvertes. Ce qui représente un bassin pour 15 000 habitants. Je rappelle, au passage, que les piscines de Chéserex et Coppet sont issues d'une réflexion entre plusieurs communes. A Gland, l'ouvrage n'entre dans aucun concept régional. Et puis plusieurs gros projets sont déjà en cours, comme des logements dans le secteur "Gare Sud" ou encore la rénovation du bourg. Nous avons aussi de gros problèmes de circulation et de sécurité qu'il faudra résoudre. Je crois donc que Gland a d'autres priorités que de construire une piscine. D'autant plus que nous avons déjà un bassin aux Perrerets qui satisfait aux besoins des écoles et qui est aussi ouvert au public.
Cette piscine est discutée depuis cinq ans au sein du Conseil. A chaque étape, il y a eu débat. Mais les conseillers ont toujours fini par soutenir la Municipalité. N'est-ce pas incohérent de vouloir faire machine arrière?
Je rappelle qu'il a fallu deux conseils en 2012 et douze pages de PV pour choisir une variante. Que les conseillers partisans d'une piscine sportive n'ont pas validé le projet final en 2014. Tout ça pour dire que cette idée de piscine n'a jamais été si évidente qu'on le dit. Personnellement, j'ai toujours lutté contre, depuis 2012. Et avec les mêmes arguments qu'aujourd'hui.
Gland souffre de son image de cité-dortoir. La ville ne risque-t-elle pas de conserver cette étiquette sans infrastructures fédératrices?
Il y a plus de trente ans, on a construit la piscine des Perrerets. Et ça n'a rien changé! Ce n'est pas la création d'une piscine qui modifiera l'image de Gland. D'ailleurs, je ne trouve pas que c'est une ville-dortoir. Il y a beaucoup d'infrastructures sportives, de clubs. Ce qui manque, c'est un grand centre commercial, du type La Combe à Nyon, où les gens pourraient se rencontrer. Un beau bourg, avec des commerces, et un accès au lac.
Depuis le début des débats, au sein du Conseil communal, Gilles Davoine (GDG) a toujours clamé haut et fort son soutien au projet de piscine présenté par la Municipalité. Pour contrer le mouvement référendaire, il a fondé, avec d'autres partisans, l'association "Pour une piscine à Gland".
Gilles Davoine, pourquoi voterez-vous "oui" à la piscine?
Parce qu'il s'agit d'une infrastructure destinée à l'ensemble de la population. Enfants, adolescents, familles, sportifs, personnes âgées. Pour une ville qui souffre toujours de son image de cité-dortoir, c'est le moment d'investir dans des installations fédératrices. Prenons l'exemple de la patinoire provisoire, à Grand-Champ. C'est une infrastructure moins rassembleuse qu'une piscine - tout le monde ne peut pas faire du patin à glace - pourtant elle marche très fort depuis plusieurs années.
On sait qu'à Gland la valeur du point d'impôt est faible, notamment parce que la ville compte beaucoup de jeunes citoyens qui ont des petits revenus. Et dès que ces jeunes gagnent mieux leur vie, ils partent s'installer ailleurs. C'est la démonstration qu'il faut continuer de créer des infrastructures qui donnent envie aux gens de s'établir durablement dans la commune.
Mais y a-t-il une véritable demande pour une piscine?
La demande est forte, c'est indéniable. La piscine des Perrerets, pourtant petite et ancienne, est déjà pleine à craquer. Mais je crois que, pour faire leur choix le 8 mars, les Glandois ne doivent pas seulement se demander s'ils iront nager ou non. Ils doivent avant tout évaluer si cette infrastructure peut apporter quelque chose à la ville, de façon plus globale. Ce qui m'inquiète, c'est que les citoyens n'ont pas forcément toutes les données du dossier en main. Ils doivent bien se rendre compte que le projet a été étudié durant cinq ans au sein du Conseil communal. Et qu'il a toujours été soutenu par une large majorité des conseillers ainsi que par la commission des finances.
L'un des arguments des référendaires est que ce projet était initialement chiffré à 11 millions de francs. Et que son coût avoisine aujourd'hui les 18 millions.
Cet argument est totalement faux. Il n'y a jamais eu de projet à 11 millions. En 2010, la Municipalité a présenté son premier préavis sur l'infrastructure. L'objectif était alors de faire une demande de crédit pour lancer un concours d'architecture pour la piscine. Ce qu'on demandait aux différents bureaux d'architectes, c'était de présenter un projet sur une base de 11 millions de francs. Mais il était alors très clair que cette somme ne portait que sur ce que l'on appelle le CFC2, soit le gros oeuvre du bâtiment. Tous les bureaux d'architectes participants ont ainsi rendu leur copie dans cette fourchette de 11 millions.
C'est en 2011 que le projet complet, avec tous les aménagements intérieurs et extérieurs, a été présenté au Conseil communal. Les projets des participants au concours oscillaient entre 16,7 millions et 23,2 millions. Au final, la piscine se chiffre aujourd'hui à 17,7 millions. Et, après perception des subsides, elle avoisinera les 16 millions.
Quelle est votre position sur la hausse fiscale associée?
Ça n'a jamais été une surprise. En 2010, suite au premier préavis "piscine" présenté par la Municipalité, la commission des finances disait déjà dans son rapport que les coûts annuels de l'installation se chiffreraient aux environs de 900 000 francs. Et que cela représenterait un peu plus d'un point d'impôts. Ces documents sont publics. Après, c'est de l'honnêteté et de la transparence de la part de la Municipalité que d'affecter 1,5 point à la piscine plutôt que de noyer cela dans une hausse d'impôts visant à couvrir l'ensemble des charges de la commune, qui augmentent.
Pour faire campagne, vous avez monté l'association "Pour une piscine à Gland". De qui se compose-t-elle?
On y trouve des gens de tous bords politiques, mis à part de l'UDC. Cette association a pour but de ne pas donner l'impression que, dans ce dossier, c'est la Municipalité contre le reste du monde. Car ce n'est pas le cas. Ce projet a été soutenu par de nombreux citoyens et, je le rappelle, par le Conseil communal et la commission des finances.